Elles se sont rassemblées au moment où était jugé en appel le cas de Rachel, une maman de 29 ans, originaire de Saint-Marcellin. Ses trois enfants de 4, 6 et 8 ans, diagnostiqués par des centres spécialisés comme autistes, lui ont été retirés cet été par décision du juge des enfants. Ils ont été séparés et placés par les services d'Aide Sociale à l'Enfance parce qu'elle serait à l'origine de leurs troubles. La situation est compliqué par un contexte de conflit avec le père dont elle est séparée.
Elle a fait appel de cette décision et l'affaire était rejugée ce vendredi devant la chambre des mineurs de la Cour d'appel de Grenoble.
Nous avons des enfants autistes, nous pourrions tous être des Rachel" (les associations)
Pour les associations qui se sont rassemblées devant le palais de Justice pendant l'audience, ce cas qui n'est pas unique est en France est emblématique parce qu'il montre le manque de formation des professionnels de l'enfance et de la santé sur cette maladie. C'est ce que défend Ghislaine Lubard, présidente de l'association Envol Isère Autisme.
"Nous avons des enfants autistes, nous pourrions tous être des Rachel"
La France a une vision psychanalytique de l'autisme en retard de 50 ans"
L'avocate parisienne de Rachel, Sophie Janois, s'est spécialisée dans la défense des familles d'enfants autistes.
"La France a 50 ans de retard dans sa vision de l'autisme"
L'affaire a été mise en délibéré au 25 février prochain. Rachel est soutenue par Autisme France qui a publié uncommuniqué sur son histoire.
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«Dans ce dossier, tout le monde nie l’autisme alors qu’on a les diagnostics»
Par Elsa Maudet — 22 janvier 2016 à 08:38 (mis à jour à 09:01)
Le dossier s’est vraiment gonflé : les deux autres enfants ont eux aussi été diagnostiqués autistes. Aujourd’hui le diagnostic est très clair pour les trois enfants, et pour la mère aussi, qui est Asperger [une forme d’autisme sans retard mental, ndlr]. Sa froideur, son ton monocorde et le fait qu’elle ait du mal à soutenir le regard s’expliquent par son syndrome autistique. Mais on ne va pas placer tous les enfants de mères autistes ! Ces dernières sont plus à même de comprendre leurs enfants autistes et donc de les protéger, parce qu’elles sont comme eux.
Elle vit très mal le placement. Elle voit ses fils une demi-heure chacun tous les quinze jours, et sa fille une heure tous les quinze jours. Ils ont droit à un coup de téléphone la semaine de la visite et deux quand il n’y a pas de visite. Ce sont les enfants qui appellent, Rachel n’a pas le droit de connaître leurs numéros.
Etes-vous confiante sur l’issue de cet appel ?
Je ne le sens pas bien parce que j’ai vu le rapport de l’aide sociale à l’enfance : il n’évoque à aucun moment l’autisme. C’est vraiment très étrange, ce dossier, parce que tout le monde nie l’autisme alors qu’on a les diagnostics. Je ne connais pas une mère qui a envie que son enfant soit autiste. Il n’y a qu’une psychiatre qui dit que les enfants ne le sont pas, c’est l’experte [judiciaire, ndlr]. Or les juges ont tendance à suivre l’expert psychiatre et l’aide sociale à l’enfance. J’ai parfaitement conscience qu’on va sur un terrain miné.
Les services sociaux cherchent à obtenir un mea culpa de la mère, qu’elle reconnaisse qu’elle s’est trompée sur les diagnostics. C’est hors de question. C’est un bras de fer, ni plus ni moins. On a le monde entier contre nous.
C’est classique, les services sociaux sont incapables de se dédire. On considère que les professionnels de l’enfance sont les meilleurs parents qui soient. Dans la tête de tout le monde, l’aide sociale à l’enfance, c’est le parent idéal, le placement ne peut avoir que des conséquences positives alors que la séparation brutale et incompréhensible pour les enfants (puisque jamais Rachel n’a été accusée de maltraitance, mais de représenter un prétendu danger psychique), et l’éloignement forcé d’une mère aimante, ne peuvent être que de lourds de traumatisme.